Abstract
Nous remettons en question la notion de libertinage, non en niant son unité et son contenu philosophique mais, au contraire, en dégageant le rôle foncier de l’athéisme. Ceci ne va pas sans difficultés : d’abord, le rejet du terme « athée » par les auteurs dits « libertins » eux-mêmes, puis la double caractérisation des libertins courante chez les spécialistes, d’une part, sur le plan théorique, par l’anti-dogmatisme et, d’autre part, sur le plan politique, par un conservatisme qui s’exprime à travers la thèse de l’imposture nécessaire des religions. Nous proposons, à l’inverse, de caractériser les libertins par un athéisme foncier, conscient ou non, et un humanisme qui ne doit pas se cantonner à la sphère morale mais se traduit en politique par les idées de tolérance et de « liberté de conscience ». En conséquence, l’idée de « droit naturel » n’est pas l’apanage de la pensée chrétienne ni la libre pensée n’est une simple laïcisation de la pensée religieuse. Toutefois, le lien entre l’athéisme et les Lumières du siècle suivant est discutable, tant sur le plan politique que scientifique. Est-ce à dire que le concept de « Lumières » appliqué aux libertins soit anachronique?