Abstract
Cet article propose une étude conceptuelle d’une pratique scientifique. L’analyse phylogénétique, méthode phare en biologie de l’évolution, permet d’inférer les relations évolutives entre différentes espèces ou organismes. De nos jours, elle fait souvent intervenir l’usage de données moléculaires, dont les résultats sont appelés des phylogénies moléculaires. Comment caractériser cette pratique? Nous commençons par une présentation de la méthode, en la découpant en quatre étapes : (1) l’identification puis (2) l’alignement de séquences homologues (descendants d’un ancêtre commun) ; (3) la construction puis (4) l’interprétation d’un arbre phylogénétique. Nous montrons que l’analyse phylogénétique n’est pas une expérimentation, et donc n’appartient pas au « style de laboratoire », tel que défini par Hacking. Elle ne correspond pas non plus à une méthode typique des sciences historiques, telle que décrite par Cleland. Bien que la correspondance de l’analyse phylogénétique avec ces catégorisations ne soit que partielle, nous défendons l’utilité de chacune de ces confrontations pour souligner des aspects distincts de cette pratique. Nous remettons aussi en cause l’idée d’une séparation méthodologique nette entre sciences expérimentales et sciences historiques.