Abstract
La philosophie politique, dans sa tradition dominante, prend essentiellement en vue la possibilité d’une continuité plus ou moins harmonieuse entre personne et société, entre individu et communauté – que ce soit dans la figure du contrat, de l’association, du transfert de forces ou dans celle de l’universalité concrète de l’État. La pensée du politique autorisée par l’éthique de Levinas frappe de discontinuité les formes et les instances d’homogénéisation ou de dialectisation qui découlent de ce modèle. Elle propose une pensée de l’altérité comme interruption radicale mais fragile des totalisations et des autonomisations de la politique. Dans le contraste entre visage et personne, entre proximité duelle et multiplicité des tiers, dans l’équivoque même de la personne, dans l’inspiration de la société et de la politique par ce qui vient avant elles, une pensée de la Justice s’esquisse, originale et profonde.