Mort et vie du positivisme
Abstract
Une des réactions qui m’a le plus surpris suite à la publication, avec Alan Sokal, d’ Impostures intellectuelles (1), c’est l’accusation qui nous a été faite d’être « positivistes ». En effet, nulle part nous ne défendons cette doctrine et, les rares fois où nous en parlons, c’est pour la critiquer. Néanmoins j’ai vite compris qu’il fallait distinguer entre positivisme et « positivisme », c’est-à-dire entre une doctrine philosophique complexe ayant prospéré à une certaine époque et à laquelle plus personne n’adhère, du moins dans son intégralité, et une épithète qui est utilisée pour discréditer l’adversaire (2). Dans cet article, je voudrais brièvement expliquer certains aspects du positivisme tel qu’il a réellement existé, les difficultés que cette doctrine a rencontrées et l’héritage de cette tradition qui me semble défendable (et qui est en général facilement discrédité grâce à l’utilisation du label « positiviste »). Je me limiterai au positivisme « anglo-saxon », c’est-à-dire au Cercle de Vienne et à ses successeurs, qui est à la fois plus récent et plus influent, à l’échelle mondiale, que celui de Comte. De plus, j’isolerai de cet ensemble complexe de doctrines certains aspects..