Abstract
La distinction entre les faits et les valeurs a toujours été fondamentale pour la pensée anglo-saxonne, et ce depuis au moins Hume. Deux siècles plus tard, Wittgenstein n’est sans doute pas très loin de cette idée en prétendant, dans son Tractatus, que la valeur ne réside pas dans le monde (6.4 - 6.421), affirmation qui le pousse à conclure que « L’éthique et l’esthétique sont une seule et même chose ». La distinction fut pérennisée dans le domaine de l’esthétique par des penseurs comme C.L. Stevenson ou I.A. Richards. Toutefois, à la même époque que Richards, des théoriciens marxistes tenaient des propos diamétralement opposés à la doxa traditionnelle. On peut synthétiser à partir de leurs écrits un « principe de la non-neutralité ». Selon ce principe, aucune œuvre d’art ne peut être politiquement et socialement neutre ; toute œuvre jouera forcément un rôle dans le débat politique en cours. Ce principe, que l’on reliera à la notion de narrativité grâce à quelques œuvres contemporaines (Morellet, Braxton...) nie toute division draconienne entre fait et valeurs dans le domaine esthétique, sans pour autant justifier l’abandon total de la distinction proposée par Putnam.