Diogène n° 265-265 (1-2):175-193 (
2020)
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Abstract
L’amitié connaît un regain de faveur dans la Chine ancienne à partir des Song, avec l’attractivité sans précédent du système des examens mandarinaux dans les milieux savants. Mais quoi de plus éloigné, en apparence, du rapport égalitaire auquel nous associons l’amitié que le système foncièrement hiérarchisant que sont les examens? Le cas de la session de 1057 offre une vue exceptionnelle sur les possibilités du déploiement de l’amitié dans un contexte de sociabilité très hiérarchisée, à travers les rapports de l’examinateur en chef Ouyang Xiu 歐陽修 (1007-1072), d’un des sous-examinateurs Mei Yaochen 梅堯臣 (1002-1060) et d’un jeune lauréat, Su Shi 蘇軾 (1037-1101). En croisant les perspectives de l’histoire littéraire, de l’histoire politique et de l’histoire administrative, nous nous demandons d’abord comment les échanges poétiques ont pu créer un cadre amical parmi les examinateurs dans un contexte institutionnel inévitablement tendu, et finalement favoriser une action commune. Nous nous interrogeons ensuite sur les circonstances qui ont permis à l’amitié déjà ancienne de Ouyang Xiu et Mei Yaochen de s’approfondir à la faveur d’un échange poétique, et dans quelle mesure le prestige de cet échange a pu accroître le renom de Mei Yaochen. Quant aux lettres de remerciement de Su Shi, nous examinons comment a pu se créer à travers elles une « affinité élective » entre les deux examinateurs et le jeune lauréat.