Abstract
À partir d’une étude de cas portant sur le « scandale des fiches », qui mit en cause les pratiques de surveillance de la police politique suisse, nous montrons que, contrairement à ce qu’affirment nombre de travaux, l’ampleur du scandale ne peut-être déduite de celle de l’indignation pas plus que cette dernière ne peut être rapportée à la gravité supposée de transgressions. Un scandale n’émerge que si des acteurs, à partir de leur évaluation de la situation et de leurs perceptions du possible, s’autorisent à exprimer publiquement une indignation, qu’elle soit feinte ou sincère, et parviennent à imposer une qualification déviante des pratiques concernées entraînant des mobilisations dans plusieurs espaces sociaux. En déplaçant la focale sur la dynamique émergente de mobilisations multisectorielles, nous plaidons pour une approche relationnelle et processuelle de la dimension émotionnelle du scandale, inséparable de sa dimension cognitive.