Abstract
Les études interdisciplinaires dans les domaines des études amérindiennes et indigènes (NAIS), de l’ethnographie, de l’anthropologie et de l’histoire ont largement débattu de l’importante biographie de sainte Catherine Tekakwitha, la première sainte indigène. Cet article propose une lecture attentive des récits de vie de Tekakwitha et sur Tekakwitha, qui sont tellement centrés sur la mort qu’on peut les qualifier d’« écrits sur la mort ». Les écrits sur la mort documentent les relations entre les vivants et les morts. Cet article examine les documents autochtones parallèlement à un texte colonial : d’abord la participation de Tekakwitha à la tradition du wampum, puis la notice nécrologique de l’explorateur et auteur jésuite Pierre François Xavier de Charlevoix, annexée à son Histoire et description de la Nouvelle-France (1744). Cette double approche offre deux perspectives sur le pouvoir de la mémoire de Tekakwitha : Tekakwitha et Charlevoix ont tous deux contribué à l’émergence de formes modernes de récits de vie au dix-huitième siècle. Je présente le texte monumental de Charlevoix, à un niveau macro, comme une nécrologie de l’ordre colonial français et jésuite en déclin ; et, à un niveau micro, comme un recueil de nécrologies d’individus indigènes, dont la plus importante est celle de Tekakwitha. Je soutiens que la Nouvelle-France sert à affirmer l’importance de la France, des Jésuites et de Charlevoix lui-même, en les alignant sur le projet européen de colonisation et en invoquant le pouvoir des personnes autochtones décédées, en particulier Tekakwitha. Simultanément, l’écriture de la mort qu’illustre Tekakwitha a fonctionné comme un imaginaire de l’énergie, renforcé par la controverse suscitée par sa caractérisation en tant que femme indigène exemplaire. L’article conclut en affirmant que Tekakwitha est une « présence active » qui continue à façonner le discours sur son héritage.