Abstract
J' crirai doublement l'histoire de mon me', affirme Rousseau dans le premier pr ambule des Confessions r ciproquement, celles-ci exigent donc une lecture d doubl e, d chiffrant dans la chronique r trospective des faits la manifestation d'une v rit int rieure qui rel ve bien moins de l''autobiographique' ('les faits ne sont ici que causes occasionnelles'), que d'une qu te spirituelle et morale dont l'enjeu est anthropologique ('que chacun puisse conna tre soi et un autre'). Mais il s'agit aussi d'une entreprise de r valuation mythique de l'existence, o le destin du fils du malheur laisse transpara tre en filigrane les intersignes d'une vocation messianique: en plein dix-huiti me si cle, cette m moire fabuleuse rouvre ainsi les 'portes d'ivoire et de corne', inventant l'art d' crire le temps rem mor comme ternit retrouv e. C'est le temps de Mn mosyne et des Muses: celui de la fable et de la bible, de la trag die et du roman; mais c'est aussi celui de la r miniscence spontan e, qu'il faut articuler la th orisation que l' poque en donne pour mieux comprendre l'originalit de Rousseau: profond ment dualiste en effet, n'envisageant la sensation que comme support d'une m moire des sentiments inn s seule garante de v rit, capable enfin de mobiliser volont sa m moire heureuse, il ne doit pas tre compris en termes sensualistes, ni m me en termes de m moire affective, mais en fonction de sa propre philosophie qui connecte m moire du bonheur et dictamen dans le sentiment de l'existence.