Abstract
L’étude a pour but d’évaluer la contribution de la pensée politique de Platon à la genèse de l’État de droit actuel. Loin d’être la source des « totalitarismes » modernes (Karl Popper), la pensée platonicienne a amorcé une réflexion millénaire sur l’État de justice conçue comme un ordre proportionnel. En témoigne le premier jusnaturalisme chrétien (ve-xve siècle) qui, à l’aide de Platon, a construit la cité humaine juste comme une mimesis de l’univers régi par le Dieu chrétien parfaitement juste. L’écho moderne de la conception platonicienne se retrouve au xviie siècle dans la construction de la cité humaine opérée par le théologien et métaphysicien Francisco Suárez. Selon Suárez, qui s’appuie sur les Lois de Platon, l’origine de la cité humaine se situe dans la volonté unanime du peuple souverain qui cherche à construire une communauté parfaite, c’est-à-dire juste. L’État de droit actuel s’avère être une prolongation de l’État de justice suarézien ; il fut le fruit du travail des successeurs de Suárez à partir de Grotius jusqu’à Locke et à Kant.