Abstract
Le corps entier des sciences peut estre consideré comme l’ocean, qui est continué partout, et sans interruption ou partage, bien que les hommes y conçoivent des parties, et leur donnent des noms selon leur commodité. Et comme il y a des mers inconnues, ou qui n’ont esté navigeés que par quelques vaisseaux que le hazard y avoir jettés: on peut dire,[10] de même qu’il y a des sciences dont on a connu quelque chose par rencontre seulement et sans dessein. L’art des combinaisons est de ce nombre; elle signifie chez moy, autant que la science des formes ou formules ou bien des variations en general. En un mot, c’est la Specieuse universelle ou la Characteristique. De sorte qu’elle traite de eodem et diverso; de simili et dissimili; de absoluto et relato; comme la Mathematique ordinaire traite de [15] uno et multis, de magno et parvo, de toto et parte. On peut même dire que la Logistique ou bien l’Algebre luy est sousordonnée en un certain sens. Car lorsqu’on se sert de plusieurs notes indifferentes, ou qui au commencement du calcul pouvoient estre echangées et substituées mutuellement sans faire tort au raisonnement, en quoy les lettres d’Alphabet sont fort propres; et lors que ces lettres ou notes signifient des grandeurs, ou [20] des nombres generaux, il en vient l’Algebre ou plus tost la Specieuse de Viete. Et c’est justement en cela que consiste l’avantage de l’Algebre de Viete et de Descartes sur celle des anciens, qu’en se servant des lettres au lieu des nombres tant connus, qu’inconnus, on vient a des formules, ou il y a quelque liaison et ordre, qui donne moyen à nostre esprit de.