Abstract
L'une des doctrines traditionnelles qui a le plus stimulé les deux premières générations de philosophes analytiques est l'idée kantienne d'une distinction entre jugements analytiques et synthétiques. À cet égard, l'ardeur philosophique fut d'ailleurs si grande que dès le début des années cinquante on était parvenu au constat qu'elle ne survivrait pas au XXe siècle. Ce fut d'abord la notion de jugement synthétique a priori qui tomba sous la critique que lui adressaient les membres du Cercle de Vienne. Quelques années plus tard, Quine s'attaquait à la dichotomie entre jugements analytiques et synthétiques avec le résultat que la distinction elle-même se vit chassée du champ de la sémantique et de l'épistémologie. Or, contre toute apparence, la question ne semble pas être définitivement réglée. L'objectif premier de Jocelyn Benoist dans son livre L'a priori conceptuel consiste à explorer la possibilité de réhabiliter une certaine notion de synthèse a priori. Cette notion proviendrait d'une lecture bolzanienne de la conception husserlienne de l'a priori matériel, c'est-à-dire d'une lecture faite à la lumière de la théorie des «propositions conceptuelles pures» que présente Bernard Bolzano dans sa Théorie de la science.