Abstract
Cet article se propose de préciser la relation entre l'épanouissement de l'autobiographie allemande de la fin du XVIIIe siècle et l'essor de la bourgeoisie en s'appuyant sur la notion de carrière de Luhmann. Cette notion rend compte de la nécessité pour l'individu, dans la société fonctionnelle bourgeoise, de trouver une identité personnelle et sociale grâce à la description de sa vie sous forme orale ou écrite. L'autobiographie de Jung-Stilling, publiée au fur et à mesure de son ascension sociale, montre bien le rôle extraordinaire de ce récit dans la constitution de l'identité et l'amélioration des chances pratiques de son auteur. Au contraire, le roman psychologique, Anton Reiser, de K. P. Moritz décrit l'impossibilité du héros à poursuivre une carrière et à construire son identité à cause de son imagination débordante. L'autobiographie du XVIIIe siècle s'avère ainsi être l'autopoïesis littéraire de l'individualité concrète de ses auteurs.