Abstract
Peu de textes ont produit autant d’effet que Le concept de Dieu après Auschwitz. Cela tient sans doute à la profonde humanité de l’hommage rendu par Hans Jonas aux victimes de la Shoah. Toutefois, parallèlement au registre de la déploration funèbre, Jonas développe des considérations conceptuelles. On voudrait, au moyen d’une analyse structurale et en retraçant la trajectoire du mythe jonassien du retrait, souligner la séparation de ces registres et réévaluer la force des arguments. Contrairement à une appréciation courante, l’impuissance de Dieu n’est pas une conclusion dont la prémisse serait le caractère injustifiable de l’horreur d’Auschwitz. Par ailleurs, on peut contester la cohérence conceptuelle du renoncement de Dieu à sa toute-puissance, comme J.-L. Solère l’a déjà entrepris. Toutefois, même en s’affranchissant des concepts théistes classiques, la question de la responsabilité de Dieu ne serait pas réglée pour autant. Les aveux d’impuissance divine pourraient s’avérer contradictoires et inutiles. Ce qui n’empêcherait pas cet échec argumentatif de continuer à revêtir une signification compassionnelle.