Abstract
Le principe de raison, le fait de rendre raison de toutes choses en les référant à un principe fondamental inquestionné, commande, pour Heidegger, la mobilisation totale et la computation universelle du monde par la technique. La critique de ce principe semble conduire Heidegger à une pensée du délaissement des choses et à une épistémologie de l'innocence, affranchies de tout effet de pouvoir métaphysique, politique ou sociologique. Mais l'innocence est ici ambiguë. Elle rappelle le jeu héraclitéen de l'enfant-roi et annonce le retour d'une souveraineté mystérieuse. Le pouvoir de la technique est conjuré au profit d'une autre puissance non moins impérieuse et absolue, une « surpuissance » qui pourrait bien à son tour signifier, d'une façon plus décisive encore que le devenir-technique de la pensée, l'accomplissement et la fin de la métaphysique.