Abstract
Un certain nombre de critiques ont affirmé que dans la doctrine de Descartes il n’y a aucune possibilité d’une esthétique. La plupart des autres ont pensé qu’il y avait, dans cette doctrine, tout au moins une esthétique implicite et que cette esthétique, dont ils empruntaient les traits, non à Descartes lui-même, mais à des critiques comme Boileau, d’Aubignae, Bosse, de Chambray, etc., était rigoureusement rationaliste, Descartes ayant « confondu le Beau dans le Vrai ».J’ai essayé de montrer qu’il y a une esthétique cartésienne explicite : que 1° cette esthétique est moins pauvre qu’on ne Ta dit, si Ton tient compte de tout ce qui dans les Lettres du philosophe est relatif à l’art ; que 2° le Compendium musicæ est plus riche en théorie qu’on ne l’a cru et que les vues qu’y développe Descartes ne valent pas seulement pour la musique ; que 3° ces vues ne sont pas rigoureusement intellectualistes, mais que la part qui y est faite à la sensation et à l’association est au moins égale à celle revendiquée pour la raison ; que 4° s’étant posé la question de savoir ce qu’est le Beau en général, Descartes a conclu qu’il est impossible de le déterminer, qu’il n’y a pas d’évidence esthétique et que, en dernière analyse, « ce qui plaira à plus de gens pourra être nommé simplement le plus beau ».